Aujourd’hui emblématique de l’Argentine, le malbec est pourtant bel et bien français. Il est cultivé dans la Loire, mais beaucoup plus dans le Sud-Ouest, dans la région de Bordeaux et celle du Quercy surtout, d’où il est originaire.
Parcours d’un cépage populaire, qui prend différents visages selon l’endroit où on le cultive.
Né d’un croisement naturel entre le prunelard, vieux cépage du Tarn, et la magdeleine noire des Charentes, qui est aussi un parent du merlot, le malbec est autorisé dans plusieurs appellations du Sud-Ouest, où il se retrouve toujours en assemblage: bergerac, pécharmant, montravel, côtes-de-duras, côtes-du-marmandais, buzet, brulhois, coteaux-du-quercy.
Mais c’est à Cahors qu’il est roi. Il y est connu sous le nom d’auxerrois et doit constituer au minimum 70 % de l’assemblage, qui peut être complété de merlot ou de tannat.
Grappes de malbec
PRÉSENT À BORDEAUX
Au 18e siècle, il est introduit à Bordeaux sous le nom de « malbec », d’après celui qui a contribué à sa propagation dans la région. À Saint-Émilion, on le connaît sous le nom de « pressac », ou « noir de pressac ».
Très coloré et très tannique, il vient ajouter couleur et charpente aux assemblages bordelais. Cette pratique existait déjà avant sa culture dans la région, quand les « vins noirs » de Cahors venaient donner un peu plus de corps aux vins parfois maigres de Bordeaux.
Il y est toujours cultivé aujourd’hui, mais ne joue qu’un rôle secondaire, derrière le merlot, le cabernet sauvignon et le cabernet franc.
DES VINS COLORÉS ET TANNIQUES
Dans la Loire, il est connu sous le nom de « côt », fort probablement issu d’une contraction du mot « Cahors ». Il est principalement cultivé en Anjou et en Touraine, et peut représenter plus de 50 % de l’assemblage dans certaines appellations.
Vigoureux, il mûrit néanmoins plus tôt que le cabernet franc si ses rendements sont contrôlés. Ses grappes sont plutôt longues, de forme pyramidale. Il n’aime pas l’humidité et préfère les sols calcaires, argilo-calcaires ou argilo-graveleux.
Le malbec donne en général des vins très colorés, d’un violet intense, souvent reconnaissables à la vue seule. Très riche en tanins, il permet de produire des vins structurés, au grand potentiel de vieillissement, avec des arômes de fruits noirs bien mûrs.
Les malbecs de Cahors sont des vins solides et charpentés. Aux arômes typiques de fruits noirs s’ajoutent souvent un caractère distinct qui rappelle la suie ainsi qu’une minéralité marquée, parfois terreuse.
Cahors, capitale du malbec en France
Les malbecs sont riches en alcool, mais leur caractère minéral et de bons niveaux d’acidité leur confèrent aussi beaucoup de fraîcheur. Dans la Loire, le malbec est plus difficile à identifier dans les assemblages, mais il apporte structure et arômes de fruits noirs.
EN ARGENTINE
Le malbec a été introduit en Argentine en 1868 par l’agronome français Michel Pouget. Il y est aujourd’hui le deuxième cépage le plus cultivé, juste derrière le cépage indigène cereza, qui sert à l’élaboration de vins de moindre qualité.
On le retrouve partout au pays, mais il se concentre dans la région de Mendoza.
Les vins qui en sont issus ont la même couleur violacée intense, parfois avec un reflet presque néon. Résultat : il confère aux vins avec lesquels on l’élabore beaucoup de fruits noirs, parfois rehaussés d’une touche de framboise, avec des notes florales et minérales, qui s’intensifient habituellement en fonction de l’altitude du vignoble.
Vu leur charpente solide, les vins de malbec s’adaptent bien à un élevage en barrique de chêne, même si on a souvent péché par excès de bois.
Le caractère très fruité, rehaussé de notes de bois et de vanille, et la texture crémeuse des malices argentins ont beaucoup contribué à leur grand succès commercial.
COMPLICES DES GIBIERS ET DES VIANDES ROUGES
Selon leur style et leur provenance, les malbecs peuvent accompagner différents plats, mais sont en général adaptés aux viandes rouges, au gibier et à certaines volailles, comme la caille, le canard ou le faisan.
Les vins de Cahors sont tout indiqués pour la cuisine traditionnelle du Sud-Ouest : confit de canard, cassoulet, etc. Ils seront aussi parfaits avec des viandes rouges saignantes, grillées. Si les vins sont jeunes (moins de six ans), il sera préférable de les passer en carafe une heure ou deux avant de les servir, afin de les assouplir un peu et de leur permettre de mieux s’exprimer.
Les malbecs d’Argentine, plus en fruit et aux tanins plus souples, s’accommoderont d’une plus large palette de plats, mais restent tout indiqués pour des grillades de toutes sortes, dans l’esprit de la parilla (barbecue argentin).
Ils se révèlent particulièrement bons avec les viandes rouges, mais aussi avec le boudin, les ris de veau ou les tripes grillées, comme les Argentins les préparent. Ce type de malbec tiendra aussi tête sans problème à des condiments relevés, tel le chimichurri (persil, ail, piment, herbes et huile).
Chimichurri, condiment typique de la cuisine argentine
Hors la France et l’Argentine, le malbec n’est pas présent en grande quantité. On en cultive un peu en Californie, dans l’État de Washington et au Mexique, et on en retrouve un tout petit peu dans le sud de la vallée de l’Okanagan, en Colombie-Britannique.
Zinfandel, un succès californien